Déclaration du Président de l'UPA lors du LAB UPA

Le 19 octobre, le président de l'UPA, Jean-Pierre Crouzet, est intervenu lors du LAB UPA pour appeler le gouvernement à agir pour les petites entreprises au lieu de toujours favoriser les très grandes entreprises.

Monsieur le Président de la République,

Monsieur le Premier Ministre,

Mesdames, Messieurs les Ministres,

Mesdames, Messieurs,

Je pense que nous pouvons tous être d’accord pour considérer que les pouvoirs publics ont vocation à travailler pour tous les français, quel que soit leur statut ou leur situation.

Permettez-moi de rappeler qu’il existe aujourd’hui plus de 3700000 entreprises hors agriculture dont plus de 2500000 qui n’ont aucun salarié.

Et si je me limite à celles qui ont au moins un salarié, elles sont 1200000.

Force est de constater que sur ce total, 97% des entreprises françaises qui emploient 53 % des salariés, ont moins de 50 salariés.

Il y a donc seulement 3% d’entreprises qui occupent plus de 50 salariés.

Et pour l’infime minorité d’entreprises qui ont plus de 500 salariés, elles occupent aujourd’hui, en France, moins de 10% des salariés.

Or, au cours de ces dernières années, force est de constater que les politiques en particulier dans le domaine économique, mais également social, ont plus ciblé les très grandes entreprises, soit une infime minorité d’entreprise et en pourcentage peu de salariés.

Malheureusement, il ne s’agit pas que d’un sentiment.

Cette question n’est absolument pas liée à une majorité politique puisque je pourrai donner des exemples très concrets au cours des vingt dernières années.

Pour autant, afin de ne pas être trop long, je vais évoquer les mesures les plus récentes.

Au cours des Assises de la Fiscalité des entreprises, au début de l’année 2014, les travaux ont été limités à celles qui sont assujetties à l’impôt sur les sociétés.

Ainsi, de fait, plus de 1600 000 entreprises hors micro-entreprises ont été écartées.

En séance de rattrapage et parce que l’UPA l’a demandé avec beaucoup d’insistance, nous avions obtenu la mise en place d’un groupe de travail sous l’égide de la chancellerie avec l’ensemble des ministères de Bercy, pour traiter de la question des entreprises assujetties à l’impôt sur le revenu.

Les conclusions de ce groupe de travail devaient être rendues à la fin juin 2014, nous sommes aujourd’hui le 19 octobre 2015, soit plus d’un an après, et ce rapport n’a toujours pas été rendu public.

Faut-il encore rappeler que les Assises de la Fiscalité des entreprises se sont essentiellement limitées à des annonces concernant la baisse de la C3S, c’est-à-dire de la contribution sociale de solidarité des sociétés qui ne concerne que 200000 entreprises et dont le produit est concentré à 80% sur 40000 entreprises.

Autrement dit, les décisions prises à l’issue de ces Assises ne concernent qu’une minorité d’entreprises françaises.

Le pacte de responsabilité que l’UPA souhaite voir confirmé, a pour autant été bâti, plus pour les très grandes entreprises que pour l’ensemble des entreprises françaises.

Nous vous avions d’ailleurs alerté sur le fait que le CICE ne prenait pas en compte la situation des entreprises qui ne sont pas constituées sous la forme sociétaire et dont le chef d’entreprise relève du régime social des indépendants.

Là encore, l’UPA a dû se battre pour que cette injustice soit réparée et je vous en donne acte ceci a été fait par le gouvernement puisque nous avons pu obtenir une baisse des cotisations d’allocations familiales pour les chefs d’entreprise ressortissant du RSI.

Mais là encore, nous avons dû passer par une séance de rattrapage.

Je rappelle une fois de plus qu’un allègement direct des cotisations sociales au lieu du CICE, serait beaucoup plus adapté pour les plus petites entreprises, et aurait un effet bien meilleur sur la création d’emplois.

Ce prisme «très grandes entreprises», nous le rencontrons aussi dans tous les domaines du dialogue social.

Comme souvent dans notre beau pays, il y a des modes, et la mode aujourd’hui, c’est le «tout-entreprise».

Autrement dit, il faudrait renvoyer la négociation au niveau de l’entreprise.

Là encore, c’est oublier totalement la réalité du monde entrepreunarial français que j’ai rappelé en introduction.

Les chiffres parlent pourtant d’eux-mêmes: moins de 40000 accords d’entreprise ont été conclus en 2013.

En sachant que 40000 accords, cela ne veut pas dire 40000 entreprises, puisque pour nombre d’entre elles, plusieurs accords ont été signés.

Une table ronde cette après-midi va être consacrée au projet de compte personnel d’activité.

Ce compte aurait vocation pour toute personne à rassembler dès son entrée sur le marché du travail et tout au long de sa vie professionnelle, indépendamment de son statut, les droits sociaux personnels utiles pour sécuriser son parcours professionnel.

Quelle belle ambition!

Ce nouveau dispositif aurait vocation à intégrer le compte personnel de formation.

Or, le compte personnel de formation créé, par la loi du 5 mars 2014, a aussi vocation à être universel et à s’appliquer donc quel que soit le statut de la personne.

Mais, force est de constater, qu’aujourd’hui il est limité au monde du salariat.

Alors, c’est très bien, mois après mois, d’annoncer de nouvelles réformes, mais dès lors que ces réformes ne sont pas mises en œuvre comme elles étaient annoncées, ceci remet en cause la crédibilité de la parole politique.

Autre point, sur lequel on ne peut que regretter l’absence d’une véritable politique en direction des PME, c’est le cas du régime social des indépendants, le fameux RSI!

Ce RSI est un véritable cas d’école sur l’absence de méthode pour conduire les réformes dans notre pays.

Dans un premier temps, le gouvernement présente sa réforme.

Dans un second temps, le parlement la valide.

Mais ensuite, non seulement les pouvoirs publics ne s’intéressent pas à la manière dont la réforme est conduite mais surtout les pouvoirs publics créent eux-mêmes les conditions de ce que la Cour des Comptes a appelé pour le RSI, un accident industriel.

Conduire une réforme, c’est la même chose que construire un immeuble de grands étages.

Il faut préalablement investir, il faut plus de femmes et d’hommes pour construire et mener le chantier à bien.

Or, l’Etat pris au sens large, ne permet jamais de faire cet investissement préalable.

Ainsi, pour la création du RSI, alors qu’il aurait fallu passer par une phase d’investissement, l’Etat a anticipé les gains de productivité potentiels.

Aujourd’hui le RSI traîne comme un boulet cette malfaçon de départ.

Et parce-que les coûts de fonctionnement sont contraints dans tous les organismes de Sécurité Sociale, ce que l’UPA ne conteste pas, le système informatique du RSI est toujours inadapté aux besoins et continue donc à gérer les erreurs qui nuisent aux chefs d’entreprise travailleurs indépendants.

Et oui, il y a dans toute l’action publique, et encore une fois, je le redis, ce n’est malheureusement pas un phénomène nouveau, un prisme «très grandes entreprises».

Ce prisme il faut être clair, il s’explique pour partie par la manière dont est organisée la représentation patronale française.

Pour autant, ce n’est pas là que réside le vrai problème.

Autrement dit, quoi de plus légitime que le Medef défende ses principaux adhérents et que la CGPME et l’UPA de leur côté, défendent les leurs.

Non, ce qui pose problème aujourd’hui, c’est que les pouvoirs publics ont une fâcheuse tendance à ne plus jouer leur rôle d’arbitre en toute impartialité.

C’est malheureusement ce que nous constatons ces derniers temps.

Au mois de juin, et contre toute attente, au Sénat, le gouvernement a voulu faire modifier les règles de mesure de la représentativité patronale, qui résultent de la loi du 5 mars 2014, en essayant de faire remplacer le paramètre du nombre d’entreprises adhérentes par celui du nombre de salariés employés par les entreprises adhérentes.

Autrement dit, le gouvernement n’est plus neutre et prend parti pour une organisation fort respectable au demeurant, mais qui défend pour l’essentiel les plus grandes entreprises.

Alors entendons-nous bien, et je me permets d’insister là-dessus, la France a besoin de toutes ces entreprises quelle que soit leur taille.

La France a besoin de ces très grandes entreprises dont certaines sont des fleurons au plan international.

Mais ne perdons jamais de vue, et ça ce sont les chiffres qui nous le rappellent, que ce sont les petites et très petites entreprises qui créent l’emploi et les très grandes entreprises, compte-tenu des évolutions technologiques ne créeront plus l’emploi de demain.

Dernier point que je souhaite évoquer: celui de l’apprentissage.

Après bien des tergiversations, le gouvernement a enfin pris les mesures nécessaires pour relancer l’apprentissage et les chiffres de la rentrée de septembre semblent le confirmer.

Pour autant, nous devons rapidement engager un travail de fonds sur l’accompagnement des Jeunes qui s’orientent vers l’apprentissage mais aussi de leurs familles.

Nous avons en effet pour cette rentrée beaucoup de places qui ne sont pas pourvues et des jeunes qui ne font qu’un passage éphémère dans l’entreprise.

Désolé, si j’ai pu paraître pour certains, un peu provocateur, mais je pense que je devais lancer ce cri d’alarme aujourd’hui.

Car s’il n’y a pas un sursaut collectif de notre part, je pense que nous continuerons à aller dans le mur et que la courbe du chômage ne se renversera pas.

Par ailleurs, je crains fort que les extrêmes se développent sur le vide que nous aurons laissé en direction des plus petites entreprises.

Je vous remercie

Boulangers

Artisan Pâtissier

Poissonniers

Crêpiers

Chocolatiers

Fruits et Légumes

Hôtellerie